Lorsque Dahbia Benkired, 27 ans, a été condamnée à la perpétuité incompressible le 24 octobre 2025, la Cour d'assises de Paris a frappé un record judiciaire : jamais une femme n’avait reçu la peine maximale du code pénal français. Le verdict, prononcé dans le cadre du procès de Lola DavietParis, concerne le meurtre, le viol et les actes de torture infligés à la petite Lola Daviet, 12 ans, le 14 octobre 2022 dans le 19e arrondissement de Paris. Le drame a déclenché une onde de choc qui se fait encore sentir dans les couloirs du palais de justice et au‑delà.
Contexte et déroulement du crime
Le 14 octobre 2022, sous le prétexte d’une invitation, Dahbia Benkired a attiré Lola Daviet dans son appartement du 19e arrondissement. Selon le dossier, la victime a été soumise à des violences d’une rare brutalité : viol répété, ligotage, coups de tête contre le carrelage de la salle de bain, puis asphyxie au ruban adhésif. Le corps a ensuite été dissimulé dans une malle avant que la meurtrière ne s’enfuie, errant pendant plusieurs heures. Les enquêteurs ont mis au jour le corps le 16 octobre, deux jours après la disparition de la fillette, déclenchant une enquête qui a mobilisé la police judiciaire et les services de protection des mineurs.
Le procès : faits, accusations et témoignages
Le procès de Lola Daviet s’est tenu du 20 octobre au 24 octobre 2025. L’avocat général, Jean‑Marc Dupont, a requis la peine la plus lourde en rappelant que « la société doit être protégée, et la gravité des crimes — meurtre, viol, torture — justifie une réponse exemplaire ». Au cours du débat, la mère de Lola, dont le nom a été préservé, a imploré la cour : « Je demande que cette chose soit enfermée toute sa vie », un vœu qui s’est concrétisé dans le verdict.
L’avocate de la famille, Clothilde Lepetit, avocate à la cour d’assises, a déclaré à RTL Matin le 25 octobre 2025 : « Nous avons mené trois années d’investigations approfondies. Devant le tribunal, les débats ont permis de mettre des mots sur l’impensable et d’empêcher la résurgence de tels délires. » Son discours a été ponctué par des applaudissements et des cris de « Justice pour Lola » dans la salle d’audience.
Pourquoi la perpétuité incompressible est-elle exceptionnelle ?
En droit français, la réclusion criminelle à perpétuité classique prévoit une période de sûreté de 18 ans (22 ans en cas de récidive) avant qu’une demande de libération conditionnelle puisse être envisagée. La perpétuité incompressible élimine totalement cette marge de manœuvre : aucune révision, aucune remise en liberté. La jurisprudence ne l’a appliquée qu’à des cas de terrorisme ou de meurtre particulièrement odieux, mais toujours commis par des hommes. Le verdict contre Dahbia Benkired constitue donc la première fois qu’une femme se voit infliger cette sanction, marquant un tournant dans la façon dont la justice française mesure la gravité des crimes.
Le président de la cour a rappelé que « la cour et le jury ont répondu oui à toutes les questions. Mme Benkired est coupable de viols, de torture, de meurtre, et ces actes ont été commis à l’encontre d’une enfant. » Cette phrase, lourde de solennité, résume le raisonnement juridique : la combinaison de plusieurs crimes d’une extrême cruauté crée une « circonstance aggravante exceptionnelle » qui justifie la peine maximale.
Réactions de la société civile et du système judiciaire
Des associations de défense des droits des enfants, comme l’« Enfant défense », ont salué la sévérité du jugement, estimant qu’il envoie un message fort contre les violences sexuelles commises sur des mineurs. En revanche, plusieurs observateurs des droits humains ont exprimé leurs réserves, rappelant que la peine d’emprisonnement à perpétuité incompressible ne permet aucune perspective de réinsertion, même pour les cas les plus graves. Le ministère de la Justice, représenté par le garde des sceaux, a indiqué que l’arrêt sera étudié lors de la prochaine réunion du Conseil d’État afin d’évaluer son impact sur la jurisprudence future.
Dans les médias, le programme de débat « Le Grand Débat » sur France 2 a consacré une soirée entière à la question de la perpétuité incompressible, invitant à la fois des juristes, des victimes et des représentants de la prison. Le consensus général était que, même si la peine paraît dure, elle sert à réaffirmer la protection de la société face à des crimes d’une telle violence.
Conséquences juridiques et perspectives d’avenir
Ce verdict ouvre un précédent qui pourrait influencer d’autres affaires de viol ou de meurtre aggravé. Les procureurs pourraient désormais réclamer la perpétuité incompressible plus souvent, sachant que la haute cour accepte ce recours dans des cas d’extrême gravité. De plus, le débat sur la révisabilité de la peine est relancé : les législateurs seront peut‑être poussés à préciser les critères d’application afin d’éviter une utilisation abusive.
Pour la famille de Lola, le jugement représente une forme de clôture, même si la perte reste irréversible. Dans un communiqué, la mère de la petite a déclaré : « Nous ne reverrons jamais notre fille, mais nous savons qu’elle est enfin en paix, que justice a été rendue. » Cette émotion a été ressentie par tous les membres du public présent, témoignant du poids symbolique du verdict.
Analyse juridique : ce que cela signifie pour la jurisprudence française
La décision de la Cour d'assises de Paris s’inscrit dans une lignée de jugements où le législateur a cherché à durcir les sanctions pour les crimes les plus odieux. Depuis la loi du 21 janvier 1996, les peines de réclusion criminelle à perpétuité incompressible sont réservées aux infractions terroristes ou aux meurtres aggravés. En fixant ce cap pour une femme, le tribunal a élargi, peut‑être involontairement, le cadre d’application, invitant les juristes à re‑définir les limites de la « gravité exceptionnelle ».
En pratique, les avocats de la défense devront désormais préparer des argumentations plus robustes pour contester la peine, en invoquant, par exemple, la notion de réinsertion ou de santé mentale du prévenu. Le débat autour de la possibilité de réviser la peine après 30 ans pourrait aussi gagner en visibilité dans les prochains mois.
Questions fréquentes
Pourquoi la cour a‑t‑elle choisi la perpétuité incompressible pour Dahbia Benkired ?
Le procureur a démontré que les faits combinaient meurtre, viol et actes de torture, atteignant ainsi la catégorie des crimes "extrêmement graves" définie par le Code pénal. La cour a estimé que seule la peine maximale pouvait répondre à la gravité et à la dangerosité de l’auteur, garantissant ainsi la protection de la société.
Quelles différences entre la perpétuité classique et la perpétuité incompressible ?
La perpétuité classique comporte une période de sûreté de 18 ans (ou 22 ans en récidive) après laquelle le condamné peut solliciter une libération conditionnelle. La perpétuité incompressible ne prévoit aucune révision ; le détenu reste incarcéré à vie, sans aucune possibilité de remise en liberté.
Quel impact ce verdict aura‑t‑il sur les futures affaires de viol et meurtre en France ?
Les procureurs pourront plus aisément invoquer la perpétuité incompressible dans des dossiers similaires, ce qui pourrait entraîner un durcissement des peines. La jurisprudence devra toutefois préciser les critères d’application pour éviter une utilisation généralisée.
Comment la famille de Lola a‑t‑elle réagi au verdict ?
Émue, la mère de Lola a exprimé son soulagement que la justice soit rendue et a remercié les jurés. De nombreux proches ont applaudi et scandé « Justice pour Lola » dans la salle, témoignant d’une profonde satisfaction collective.
La condamnation ouvre‑t‑elle le débat sur la réinsertion des femmes condamnées à perpétuité ?
Oui. Des ONG de défense des droits humains soulignent que la peine à vie sans aucune perspective de sortie pose la question de la dignité du détenu, même dans les cas les plus graves. Le débat public pourrait pousser le législateur à envisager des garde‑fous supplémentaires.